September 1rst, 1970
Poudlard Express
Voie 9 3/4
Départ : 11h00 Inutile de le relire une énième fois, Puck ne se trompait pas. Elle, sa mère, son père, ses deux frères et sa petite soeur qui étaient venus l'accompagner, faisaient encore une fois l'aller-retour entre les quais 9 et 10 de la gare King's Cross... Puck commençait à être anxieuse, sa mère également bien qu'elle le cachait mieux, son père suivait docilement en tenant Rhona par la main, tandis que Gavin et Ruairidh étaient intenables.
"Neuf un quart!"
"Neuf un demi..."
"Stop!... On y est!!!" conclu avec joie Ruairidh en ouvrant grand les bras pour présenter l'un des piliers du quai.
Depuis le début, ses grands frères étaient persuadés que c'était encore une des blagues de la plus farceuse de leurs petites sœurs. Après le mouton de Pâques, l'armoire voyageuse, la cornemuse possédée par le fantôme de la Reine Victoria, la boîte à thé transgenre, pourquoi pas la lettre de l'école de magie? Poudlard, si c'était pas un nom à prendre au sérieux!!! Puck était ravie que ses frères lui vouent autant de mérite et d'ingéniosité. Après tout, elle avait bien dressé un mouton pour qu'il vienne poser les œufs en chocolat qu'elle lui donnait autour de la maison, alors pourquoi n'aurait-elle pas pu dresser un hibou voyageur pour venir apporter une lettre qu'elle aurait écrit? Ce n'était pas pour rien que sa mère l'avait surnommée après le personnage farceur de Songe d'une Nuit d'Eté. Mais non, elle n'y était pour rien... Pas plus que pour l'armoire voyageuse. Si elle était une sorcière, cela expliquait bien des choses...
Puck s'arrêta devant le pilier de Ruairidh en soupirtant. Elle n'en pouvait plus de pousser ce chariot. Les robes de sorciers, les livres de Potions, de Métamorphose, d'Enchantement jusqu'à un chaudron!!! Tout n'avait pas le poids de la part des anges! Sans parler de Rob(ert the Bruce), son chat qui aviat du être enfermé dans une boîte et posé en haut du chariot.
"Arrêtes, Ruairidh, c'est pas drôle!" dit-elle par-dessus les miaulements plaintifs de l'animal.
"Mais au contraire, soeurette! Le Bout de Lard Express, Voie Neuf Trois-Quart, c'est très inventif!" répondit Ruairidh avec un sourire amusé et admiratif.
"C'est Poudlard, qu'on dit..." corrigea Puck.
"Tu as failli nous avoir au Chemin de Traviole" renchérit Gavin,
"mais avoue, c'était un festival ou une animation saisonnière?"
"C'était de la magie!!! Maman!"Mrs. Maclachlan était en train de pencher de l'avis de ses fils, mais elle su reconnaître le ton de détresse de sa fille.
"Ça suffit les garçons, vous n'aidez pas." dit-elle.
"Mais Maman," insista Gavin avec un sourire attendri.
"La Voie Neuf Trois-Quart, quand même, c'est..." Gavin ne finit jamais sa phrase. Alors qu'il s'appuyait contre le pilier, celui-ci l'avait traversé. Littéralement traversé. Comme s'il s'était agit d'air.
"GAVIN!!!""GAVIN!!!" Sans réfléchir, Puck et Ruairidh s'était précipités à sa suite. Un mur de brique n'est plus un obstacle lorsque votre frère aîné à disparu.
Ils le trouvèrent les fesses par terre, l'air hébété au milieu d'un quai bondé de parents, leurs enfants montant dans un train sur la locomotive duquel était écrit "Poudlard Express."
"AH! Tu vois? Tu vois!!! J'te l'avais dit! J'te l'avais dit!" commença à chantonner Puck en plongeant des doigts chatouilleurs dans les côtes de son frère. Il était si ébahi qu'il ne s'en rendait même pas compte, c'était pas drôle. Sa mère ne tarda pas à arriver derrière eux. Mrs. Maclachlan, Gavin et Ruairidh étaient comme hypnotisés par la locomotive et ses panaches de fumée. Puck commençait à s'impatienter.
"Et papa et Rhona?" demanda-t-elle.
"Rhona a peur de traverser le mur, il va rester avec elle et attendre qu'on revienne. Il m'a demandé de t'embrasser fort.Puck fut terriblement déçue de ne pas pouvoir dire au revoir à son père. En même temps, elle ne voulait pas forcer sa petite sœur à faire quelque chose qu'elle ne voulait pas.
"Bon... Le premier au train a gagné!" dit-elle soudain en se précipitant avec son chariot, mais Gavin avait tôt fait de se relever et de la dépasser avec son frère. Lui et Ruairidh réceptionnèrent respectivement leur petite soeur et son chariot devant le compartiment et l'aidèrent à monter sa valise. Le train était plein d'enfants de tous âges et de leurs animaux de compagnies (chouettes, crapauds, et même une drôle de boule de poil rose de la taille d'un poing). Le premier compartiment qu'ils trouvèrent était déjà occupé par deux élèves âgés de plusieurs années de plus qu'elle, mais plus jeunes que ses grands frères. Les parents sur le quai étaient quant à eux habillés aussi bizarrement qu'au Chemin de Traverse... comme dans les livres d'histoire...
"Ils auront l'électricité là-bas, hein?" demanda-t-elle timidement à ses frères en un murmure.
Ruairidh haussa les épaules.
"Tu n'auras qu'à nous passer un coup de fil pour nous le dire!"
Il y eût un coup de sifflet strident sur le quai. Mrs. Maclachlan toqua contre le fenêtre du compartiment pour indiquer à ses fils de redescendre. Il était temps de partir.
"Bon, petite sœur. Soit sage. Rends-les complètement barge." Gavin lui ébouriffa les cheveux avec un sourire. Elle les portait courts depuis deux ans pour empêcher ses frères d'y coller toutes sortes de choses (c'était surtout un moyen de se venger de ses propres farces qu'elle leur enlevait ainsi). Gavin et Ruairidh sortirent du compartiment, et dès qu'ils eurent disparu, Puck ouvrit sa valise. Sur le dessus était posé sa cornemuse. Sa mère lui avait formellement interdit de la prendre, "tes camarades de dortoir n'auront sans doute pas envie de l'entendre à longueur de soirée!" lui avait-elle dit. Mais Puck ne voyait pas pourquoi. Si même la Reine aimait qu'on lui joue un air de cornemuse tous les matins, elle ne trouvait rien que les sorciers aient à redire!
Puck ouvrit grand la fenêtre du compartiment alors que le train s'ébranlait lentement. Sa mère et ses frère lui faisaient signe de la main, et le visage de Mrs. Maclachlan se figea lorsqu'elle vit sa fille mettre sa cornemuse sous le bras. Aussitôt, l'air traditionnel d'au revoir Ecossais retentit dans l'air, puissant, strident. Les deux jeunes sorciers du compartiment sursautèrent, se bouchèrent les oreilles, puis sortirent. Mais Puck ne s'arrêta pas. Le souffle lui manquait encore un peu, elle n'apprenait que depuis un an, mais rien ne l'arrêterait. L'air poursuivait jusqu'au dernier vers du refrain, et elle vit au loin Gavin porter une main à ses yeux:
"Will ye no' come back again?"August 31rst, 1977
"ET OUI! OUI!!! C'est Woods!!! Woods s'est emparé du vif d'or et remporte ainsi cent-cinquante points à son équipe!!! Les Frelons de Wimbourne l'emportent contre les Pies de Montrose à 270 contre 100!" Alors que les sorciers vêtus de rayures noires et jaunes trinquaient en se réjouissant, Puck et les autres supporters des Pies posaient leur verre ou bien tentaient de se noyer dedans.
"Bon, une dernière pour célébrer la rentrée?" proposa Fergus. Toute la bande était venue écouter le match au Chaudron Baveur après leurs courses de fournitures au Chemin de Traverse.
"En quoi on doit la célébrer?" demanda Puck, la mine particulièrement renfrognée. Pas trace de son habituel sourire ou des étincelles d'espièglerie dans ses yeux. Puck était toujours maussade la veille de la rentrée. Ça la fatiguait de faire tout le chemin jusqu'à Londres pour prendre un train qui remontait ensuite en Ecosse. Quelle perte de temps!
"Oh, allez Puck! La Licence Appliquée à la Magie Approfondie, c'est pas rien!" Ruth tentait de lui remonter le moral.
"D'ailleurs, tu as été prise en Médicomagie?" lui demanda Fergus en cherchant ses gallions. Puck acquiesça timidement.
"Ah, bah voilà quelque chose qui se fête!!!" s'exclama Fergus.
"Whisky Pur Feu pour tout le monde!"
"NON!" hurla Puck.
"Pas ça! Bièraubeurre pour moi!" Ses amis eclatèrent de rire. Ils se rappelaient tous de la gueule de boursoufflet que Puck avait eue le lendemain du soir où elle avait voulu comparer le whisky sorcier au Scotch Pur Malt Moldu... Elle s'était alors promise de ne plus jamais goûter au Pur Feu... Fergus acquiesça et parti prendre les commandes.
Quand il fut parti, Ruth pris la main de Puck dans la sienne et s'avança pour lui demander discrètement:
"Qu'est-ce qui va pas, Siobhàn."
"On a perdu, ça te suffit pas?" répondit Puck, en espérant que cette réponse suffirait à son amie. Mais Ruth ne connaissait que trop bien l'Ecossaise.
"Moïra va bien?"A la simple évocation de ce nom, les immenses yeux bleus de Puck se mirent à briller de larmes.
Moïra. Des yeux verrons qui vivaient de l'autre côté d'Aberfoyle. Une amie avec qui elle aimait à faire des promenades le long du Loch Lomond quand Puck revenait en vacances de Poudlard. Une amie qui était devenue plus que ça l'été dernier, quand elles s'étaient baignées à Milarrochy, et s'étaient embrassées. Elles ne s'étaient alors pratiquement plus quittée, se retrouvant tous les jours pour une raison ou une autre. Aller au cinéma revoir Carrie (Puck adorait sentir Moïra toute tremblante se serrer contre elle), aller prendre un thé sur la terrasse du pub en face de la Rivière Forth, prendre le bus ensemble et passer des journées entière à Stirling, ou parfois même, à Glasgow. En Septembre, elles s'étaient écrit quotidiennement. Les lettres de Moïra s'étaient éparpillées dans toutes les affaires de Puck. Il y en avait eu une d'Octobre dans la poche d'une de ses robes de sorciers. Une de la deuxième semaine de Novembre dans sa valise. Une de Décembre, juste avant les vacances, sur sa table de chevet. Elle était partout, faisait littéralement partie d'elle. A Noël, Moïra avait même été invitée chez les Maclachlans. Si Moïra avait peur de parler de leur relation à ses parents, Puck n'avait pas douté que sa propre famille s'y ferait rapidement. En effet après une surprise passagère, ses frère s'étaient remis à la chambrer comme avant, dieu merci. Mais au fil des mois, Moïra avait répondu de moins en moins souvent, avait écrit de moins en moins ouvertement. Elle ne faisait presque plus mention de ses sentiments, se contentant de raconter ses semaines comme à un journal intime. En revenant en Juillet, Puck s'était préparée à ce que Moïra lui demande de rester amies... et fût incroyablement soulagée de la retrouver aussi douce et tendre qu'avant, aussi bien dans le bus d'Aberfoyle que sur les marches de pierres des sentiers du Loch. Jusqu'à la fin août, la veille du départ de Puck à Poudard...
"Elle ne veut plus de relations à longues distances..." finit par répondre Puck à Ruth.
"Oublie-la... Elle ne sait pas ce qu'elle perd." lui dit son amie en lui serrant la main.
"Et il y a pleins d'autres filles à Poudlard. On ne sait jamais. Et elles, elles connaissent le Quidditch!"Puck parvint à sourire et se laissa prendre au jeu.
"Une fille qui s'y connait en Quidditch! Pour un peu qu'elle soit rousse, je l'épouse!"